Milton Hyland Erickson est né en 1901 à Aurum dans le Nevada. Sa scolarité sera quand même rudimentaire et les premières difficultés d'Erickson seront alors découvertes: il est daltonien (dyschromatopsie au rouge et au vert. Plus tard, il se choisira le pourpre comme couleur favorite... parce qu'elle est peu utilisée et qu'il souhaite se distinguer); il perçoit très mal les rythmes musicaux et surtout, il est dyslexique. De ces handicaps, il fera des avantages, expérimentant sur la relativité de la perception humaine, mais aussi parcourant pendant des heures le dictionnaire, colonne par colonne, à la recherche des mots dont il ne reconnaît pas l'orthographe.
Maintenant, Erickson a dix-sept ans et va vivre un épisode tragique : il est atteint de poliomyélite (ou polioencéphalite ?). les médecins ne lui donnait pas 24 heures d’espérance de vie. Lorsque à vingt et un ans il entre en première année de médecine, il marche encore avec des béquilles, mais à la fin de cette année il va entreprendre, seul et sans argent, un voyage dont le but est d'augmenter ses forces. Il part en canoë, ne pouvant compter que sur ses propres muscles pour avancer et sur son ingéniosité pour se nourrir. Et il se débrouille si bien que dix semaines plus tard, après avoir remonté le courant, il a parcouru 1900kms, économisé 8 dollars, et surtout il marche sans béquilles; il ne garde qu'un boitement léger mais définitif.
Il rencontre l'hypnose dans un séminaire de Hull, en troisième année de médecine. Mais très vite, Erickson oppose une conception individualiste de l'hypnose à la conception universaliste de son professeur. Dès cette époque, il effectue diverses recherches sur l'hypnose.
Son premier travail s'intitule "Premières expériences sur la nature de l'hypnose et recherche expérimentale supplémentaire sur l'hypnose : réalités hypnotiques et non hypnotiques". Il s'attacha à y démontrer que les états altérés de conscience et les phénomènes de transe constituent une partie normale de la vie de tous les jours et que le plus important est la dynamique interne de chaque individu qu'il est indispensable de respecter. Il pose ainsi les bases d'une conception "naturaliste", "permissive " et "utilisationnelle" de l'hypnose. Dans une atmosphère hostile, il publie son premier article consacré à l'hypnose qui démontre que l'hypnose est un état de conscience modifiée avec "une attention intense mais focalisée", qui s'oppose à l'idée de sommeil et d'inhibition corticale défendue par Pavlov.
Dans le même temps, il s'aperçoit que le thérapeute est en état d'hypnose légère quand il devient hyperattentif au patient et que ceci est très favorable pour réagir à des indices minimes. Dans cet état, le thérapeute dispose au mieux de son potentiel conscient et aussi de son potentiel inconscient. Pendant ces quatorze années, il entreprend de nombreuses études expérimentales utilisant les indices minimaux et les formes indirectes de suggestion dans des domaines allant de la surdité aux mécanismes mentaux Freudiens et les processus inconscients.
Il développe une conception originale d'un inconscient actif et positif qui contient les solutions dont 1'individu en difficulté a besoin. Mais, si Erickson se considère comme athéorique, malgré les contacts avec tel ou tel modèle, c'est parce qu'il refuse toute position de disciple qui, pour lui, entraîne la rigidification prématurée de la pensée et de la méthode, et inhibe toute libre exploration ultérieure.
L 'hypnose d'Erickson de la fin des années 50 n'a plus beaucoup de points communs avec celle des années 20 telle qu'il l'a découverte : les définitions ne se recouvrent pas, l’autorité du thérapeute a laissé sa place à la souplesse, la directivité classique est supplantée par les approches indirectes. La transe est un état actif. D'une matière moribonde représentée par quelques académiciens intéressés par la recherche, l'hypnose est devenue une discipline florissante, par le nombre et la qualité des membres, par les multiples études et par son utilisation en clinique somatique et psychique.
Erickson finit sa vie entouré d'amis et de collaborateurs, reçoit de nombreuses visites de patients ou de confrères qui viennent parfois de très loin pour le voir, mais il reste simple; il consulte dans un petit cabinet, sans aucun luxe, un vieux bureau, quelques chaises inconfortables, des classeurs métalliques... ce qui surprend toujours les visiteurs qui connaissent sa renommée internationale. Il les invite ainsi à se méfier des idées préconçues qui inhibent toute réflexion.
Il garde le même langage simple, celui de tous les jours, refuse toute élaboration théorique, tout dogmatisme et accepte près de lui des élèves de toutes les écoles de pensée qui, comme lui, savent que chacun possède une parcelle de vérité.